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Publié le 14 novembre 2008 par L'Humanité

Affiches publicitaires : la bourse ou la vue ?

Environnement . Les affiches publicitaires génèrent des revenus pour les municipalités, mais au détriment du paysage. Des associations ont manifesté samedi.

Ils ont marché contre les « publicyclettes ». Et recouvert, à Paris, une station Vélib de publicité. Histoire de dénoncer le lien entre publicitaires et vélos en libre-service. Pour les associations Résistance à l'agression publicitaire, Vélorution et pour le Collectif des déboulonneurs, ce « service public » ne devrait pas être financé par une entreprise d'affichage publiciaire. Et encore moins lui faire gagner de l'argent.

Pour Nicolas Revel, directeur de cabinet de Bertrand Delanoë, la municipalité n'avait pas le choix. « La mise à disposition de 20 000 vélos en un temps aussi court ne pouvait être assurée que par un gros industriel, et en l'occurrence seulement les afficheurs en sont capables. » De son côté, Jean-François Legaret, maire UMP du 1er arrondissement, assure que le contrat est plus intéressant pour l'afficheur que pour la municipalité. Dans sa mairie du 2e arrondissement, le Verts Jacques Boutault estime que « le citoyen n'a pas à subir la publicité commerciale ». Après tout, si des entreprises sont prêtes à dépenser des fortunes pour leur image, ne pourrait-on pas envisager une légère hausse des taxes professionnelles ? interroge l'élu. La faute, estime Jacques Boutault, aux liens existant entre les milieux de la publicité, composés de personnes plutôt de gauche, et les élus, qui incitent ces derniers à être plus complaisants que critiques. « La publicité est alors jugée pour ce qu'elle offre et non pour sa finalité. »

complexité de la loi

Le dilemme n'est pas nouveau. De l'avis de tous (ministres, associations et professionnels), la loi qui encadre l'affichage publicitaire, datant de 1979, n'est plus adaptée aux nouvelles pratiques et elle est très mal appliquée. Quelque 40 % des dispositifs publicitaires seraient ainsi illégaux. Par ailleurs, les Français considèrent à 79 % que la publicité est envahissante, voire agressive (58 %), d'après un sondage IPSOS de novembre 2007.

Député et maire (UMP) d'une commune de 13 000 habitants en Haute-savoie, Martial Saddier est l'un des rares élus à dénoncer la complexité de la loi. « Il y a une certaine hypocrisie dans la manière dont les choses fonctionnent à l'heure actuelle. Le maire n'est pas complètement maître pour gérer les implantations des dispositifs publicitaires sur sa commune, mais il a la responsabilité de demander leur démontage en cas d'illégalité. » Martial Saddier a obtenu que la loi sur le Grenelle de l'environnement impose l'aval du maire à chaque nouveau dispositif d'affichage. Un premier pas « vers une simplification de la loi », plaide l'élu.

session de rattrapage

Cette simplification est réclamée par les associations depuis une vingtaine d'années. Elle a été oubliée lors du Grenelle de l'environnement.

Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État à l'Écologie, a promis qu'une session de rattrapage aurait lieu pour aborder le sujet. Jeudi dernier, le Conseil national du paysage était remis sur pied, avec comme première tâche de réfléchir à une révision de la loi de 1979.

Les associations s'interrogent sur cet empressement soudain. Alexandre, du Collectif des déboulonneurs, précise : « Les contributions des différents acteurs à cet atelier doivent être prêtes pour fin décembre pour un passage à l'Assemblée en mars. On ne se laisse pas le temps de la discussion et de la réflexion. De plus, cantonner les problématiques liées à l'affichage publicitaire au seul aspect paysager est extrêmement réducteur. On occulte les dimensions sociales, sanitaires, environnementales et démocratiques. Ce sujet mérite un grand débat national sur la place de la publicité dans l'espace public. »

Nicolas Hervé

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